Entre Lutes et Port Sandwich.

 

Vendredi. Nous avons ce matin parcouru 10 nautiques dans une végétation bien verte. Nous sommes passés au Nord de Uliveo,  l’île où se trouve Luttes et sommes passés sur la côte Est pour entrer dans Port Sandwich. Ici aussi, il y a une Baie du Massacre, comme dans la Bay of Islands.

Il fait très chaud, heureusement un peu de vent pour chasser mouches et moustiques. Nous avons aperçu des vaches et nous sommes mouillés près du wharf, anciennement quai Ballande, le quai est un peu démoli, mais il y a toujours un ravitaillement une fois par semaine qui approvisionne les habitants. Ballande ayant été et étant toujours un grand commerçant de NC. C’est sur cette partie de l’île, ici, que les tribus voisines se fournissent en viande pour une grande occasion comme un mariage ou les fêtes de fin d’année.

Nous sommes accueillis en français à seulement 10 nautiques d’Uliveo où en grande majorité les locaux parlaient anglais. Eric sympathise avec John et demande des légumes et des fruits.

En échange, nous fournirons deux vêtements pour ses enfants. Nous espérions des tomates, mais nous n’aurons que des pamplemousses. Jessica, son épouse, est d’Ambrym et ne parle qu’anglais.

Elle nous emmène au magasin « le Rainbow Store » où nous achetons du pain fait par Noëlla. Le jardin autour de la maison est superbe, l’épicerie un peu fournie et nous bavardons. Encore deux papayes, 2 + 2 ça fait 4, j’en ferai des confitures. Si le filet à légumes et fruits ne cède pas sous le poids, nous attendrons que les papayes murissent. Rentrés à bord, je cuisine des mi-cuits au chocolat pour remercier Noëlla alors que la pluie nous tombe dessus sans discontinuer.  Les caisses à eau se remplissent, notre système de récupération fonctionne bien.

Les claquettes et la nourrice flottent !

Ce matin, profitant du beau temps, nous sommes retournés à terre et avons été reçus dans la cuisine de la maison, très aérée. 3 côtés sont palissés de manière à laisser passer la fraicheur et recouverts d’un filet contre les rats et les oiseaux. Nous avons bavardé 2 heures avec nos hôtes, quelle sagesse ! Nous retrouvons la même état d’esprit qu’aux Gambier. Rok était instituteur, avec seulement le certificat d’études, un de leurs fils est professeur de mathématiques au collège de Lamap. Lamap est le premier mouillage dans Port Sandwich, c’est un village avec église, banque, magasins… mais Eric a préféré celui où nous sommes qui est plus à l’intérieur et où nous sommes parfaitement abrités. 3 km à pied séparent les deux villages, routes défoncées, non entretenues malgré les promesses électorales faites par un candidat il y a 3 ans, candidat non réélu cette fois-ci. D’après Rok, il s’en est mis plein les poches pendant 3 ans donc les électeurs se sont entendus pour tous voter pour une personne de l’extérieur. Dans la conversation, Rok nous apprend que les jeunes en âge de se marier se rencontrent sur Face-Book. Et autre nouvelle : la population Ni Van est vaccinée covid à 90%.

Nous avons aussi évoqué l’emprise grandissante des Chinois sur le territoire. Port-Vila devient chinois. L’État brade ses passeports sans être trop regardant sur l’intégrité des nouveaux citoyens. Une base militaire chinoise s’implanterait sur Efate.

Cet après-midi, nous avons fait de la couture. La moustiquaire avance, le panneau protecteur de pluie pour l’atelier est en place. Nous sommes ainsi protégés de la pluie et bénéficions des courants d’air grâce aux deux panneaux de toile, un au-dessus du carré, un au-dessus de l’atelier. Nous ne naviguons pas avec.

 

One more no problem! En fait, tout ce petit monde rentre de la pêche aux clams.

Récolte du kava.

Un vieux couple attendrissant passe en pirogue à côté de Manevaï. Raymonde et Antonin reviennent du jardin. Le jardin est au fond de la baie et rien ne dit qu’il soit situé en bordure de mer.

Dimanche, mince, encore loupé la messe ! Une journée de pluie et le beau temps reviendra. Ce matin, nous avons dit au revoir à nos hôtes de l’épicerie Rainbow Store, nous avons échangé les adresses mails et Noëlla nous a offert des citrons, des navets, du gingembre et des tomates. Difficile de les quitter, mais il ne faut pas trop s’attacher. Nous avons signé un de leurs livres d’or en laissant une carte de visite. Nous avons pu constater que Marie Tabarly et son oncle Patrick étaient passés, ils nous ont parlé de Laurent Bourgnon, d’Éric Tabarly, de Véronique et Raymond. Cette nuit, Rok et Noëlla ont accueilli un petit chien qu’ils ont baptisé Manevaï.

À Lamap, Port Sandwich, personne ne se baigne, les enfants jouent ou pêchent du ponton. Il y a eu 2 attaques de requin mortelles en une dizaine d’années. Moi qui comptais me remettre au crawl, dommage, voilà comment les bonnes intentions sont tuées dans l’œuf.

C’est curieux, car il n’y a aucun écrit dans les blogs des yachties sur l’épicerie de Noëlla et surtout sur l’accueil du couple qui prend le temps d’échanger. Si nous avions su cela, nous aurions aussi apporté des journaux, tous deux sont au fait de l’actualité avec quelques jours de retard, mais qu’importe. Et à Port Moselle, nous étions sur le même ponton que 2 voiliers qu’ils voient souvent, nous aurions pu connaître leurs besoins.

Quant à la question des élections, il est vrai que les morts sont toujours sur les listes électorales, mais de plus, ils ont quelques fois deux patronymes différents.  Pour 219 candidats, il y a eu 8 à 10 millions de bulletins de vote imprimés alors que la population du Vanuatu compte 300 000 habitants dont un tiers d’enfants ! Mais ils étaient libres de choisir un candidat de l’extérieur à leur canton.

Nous attendons le beau temps pour nous rendre à Ambrym, là-bas aucun mouillage n’est bien abrité et le mauvais temps est là jusqu’à mardi matin.

Donc dimanche 23 octobre, nous sommes à Banam, toujours sur l’île de Malekula, côte Est, 10 nautiques depuis Port Sandwich, derrière un récif de corail qui ferme un peu la baie. Moins bien abrités que les deux derniers jours au fond de Port Sandwich. Arrivés ici, nous avons été accostés par une pirogue avec 4 garçons dont nous avions un peu de mal à nous défaire pour déjeuner. Ils espéraient nous emmener à la cascade. Puis sont arrivées des filles, 3 sœurs, dont l’aînée Rosalie nous a proposé des citrons. Plus astucieuses les filles, elles avaient déjà leur monnaie d’échange.

Au déballage du sac, nous nous sommes dits que c’étaient des oranges, au goût, ce sont des citrons. (Et pour notre rhume commun, de la vitamine C, c’est tout bon). Et une papaye qui passera en confiture, 2+2+1, car là, nous croulons sous les papayes. En remerciements, elles ont eu des cahiers. Ils réclament tous des books, nous pensons que ce sont des exercices-books.

Les garçons sont revenus en force, 6 sur une pirogue dont un petit qui grelottait et 2 sur une autre. Ils nous ont promis des avocats pour demain, nous avons offert 8 stylos.

À chaque fois, je prends des photos de ces enfants, il y en a quand même un qui nous a fait un doigt d’honneur alors Eric l’a doucement grondé. Ils sont tous souriants, minces, ils ne connaissent pas la Junk Food et n’ont sans doute pas assez de moyens pour acheter des sucreries au magasin… lorsqu’il y a un magasin.

Un voilier allemand, Infinity, croisé à Port-Vila, retrouvé à Emae, nous a rejoints ici. Il est un peu collé-serré.  Avec des problèmes de guindeau, le couple avait fait demi-tour pour réparer à Port-Vila. Ils essaient de rattraper leurs copains suisses de Manaia et allemands de Moana, les deux voiliers qui étaient avec nous chez les Small Nambas.

Eric a un peu frotté le Fond de la Quille ! Plus l’hélice de speedo.

Nous avons appris à dire « Sipa mobao » au lieu de « Sipa rambat » car « sipa rambat » veut dire « merci le blanc » et nous nous ne voulons pas passer pour des colonisateurs blancs. A Malikolo, Malekula, il y a 30 langues différentes. On devrait se contenter de se débrouiller en bislama plutôt que de chercher à dire le merci qui convient à chaque lieu.

Lundi, 11h, nous attendons toujours les avocats, le garçon appelé Max nous a assuré que c’était aujourd’hui Public Holidays, hum hum hum, et que nous aurions des avocats. Mais il pleut « comme vache qui pisse » et s’ils sont dans la case, ils n’ont aucune envie de sortir en pirogue.

J’ai passé la matinée en cuisine, 2 pains, une brioche et 2,7 kg de papayes qui macèrent dans le sucre, seulement les papayes, ni le pain, ni la brioche, ils sont déjà au four ceux-là. Restent à dessiner les étiquettes papaye citron vert, oui, car il y a aussi du citron vert dans les confitures. Hier soir, nous nous sommes régalés avec une mangue offerte, troquée, je ne sais plus.

Heureusement qu’Éric et moi n’avons pas le même fournisseur de data puisque depuis Port Sandwich, je n’ai plus de réseau.

Un caboteur est venu mouiller dans la baie, j’ai pris des photos au travers du rideau de pluie. Rouillé de chez rouillé, bas sur l’eau qui roulait tant et plus au mouillage.

Et Infinity a levé l’ancre. La pluie se calme un peu, quel bonheur quand il pleut de se dire chouette, les caisses à eau vont se remplir, plus de scrupules à utiliser l’eau douce du bord.

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