Iki, Kyushu.
16 avril. Nous avons quitté Hirado à regret, et avons transité vers Iki en quatre heures. Nous avons rendez-vous avec les cinq autres voiliers du rallye. Hoptoad y est amarré depuis trois jours et nous a envoyé des photos de la marina. Notre tirant d’eau étant inférieur à celui des autres bateaux, nous pouvons nous mettre à l’abri sur le premier ponton. Puisque nous avons une journée libre avant les retrouvailles, nous en profitons pour découvrir la ville et chercher du pain. La ville n’a aucun attrait excepté le Sai Shrine dédié à la déesse Sarume-no Mikoto de la mythologie japonaise. Nous admirons, (surtout moi !) le phallus en bois dressé à l’entrée à gauche des marches. Il y en a d’autres de tailles plus raisonnables dans le petit sanctuaire.
Beaucoup de gens viennent ici pour prier pour de bons matchs, des naissances sûres, l’harmonie conjugale, la guérison des maladies vénériennes et la protection des enfants. Une pratique courante aurait été l’obligation pour les hommes d’exposer leurs parties génitales devant la déesse pour obtenir la certitude de ne pas être blessés par la suite, (au combat ?) De nombreux articles relatifs aux rapports sexuels ont également été placés à l’intérieur du pavillon dont des reproductions d’estampes japonaises bien abimées par l’humidité.
La marina.
Les deux journées de rallye sont denses et sympathiques.
Premier soir potlach, une pizza et un gâteau-bananes pour ma part.
Alignement de satellites…
5h du matin le lendemain, rendez-vous à la criée, les poissons sont débarqués dans des cagettes en klegecell, de beaux barracudas, des sérioles (poissons qui ressemblent beaucoup aux thons mais sont de la famille des carangues), des huitres et des crevettes. Nous ne comprenons pas ce que dit l’appariteur, arrivons à suivre les gestes discrets des acheteurs.
Puis prise en charge en bus de tout le groupe pour un atelier cuisine. 11h confection de sushis que nous dévorons au fur et à mesure. Puis visite du Monkey Rock, un énorme rocher en forme de tête de singe.
Un stop de 40mn au Onsen, (hommes et femmes séparés), l’eau à 40° est bien boueuse et la douche en fin de barbotage est la bienvenue. Vue de notre Onsen.
Découverte du joli musée racontant l’origine du peuplement du Japon plutôt pensé pour les enfants mais vraiment très didactique, (à notre départ le personnel du musée est dehors et nous salue en se courbant).
Un stop pour admirer les dieux Jizo les pieds dans l’eau, faces tournées vers le large.
Visite de la distillerie de Yuzu, une distillerie d‘alcool de riz et d’orge. Nous nous laissons tenter par un alcool doux et par du sel parfumé à l’alcool.
Le lendemain, nous attendons les familles locales et devons leur faire visiter nos bateaux. Certains enfants sont très intéressés, certains parents aussi.
Beaucoup de photos souvenirs, il reste quand même cette barrière de la langue. Plus tard, deux mamans, sœurs ou amies, reviennent vers nous avec les enfants et nous offrent des cadeaux, teeshirts à l’effigie du Monkey Rock et magnets. Je cherche dans le tiroir à trésors ce que nous pouvons leur offrir, un torchon breton par maman et des porte-clés flottants pour les enfants.
Barbecue pour tous les équipages à midi sous tentes dressées pour le rallye.
A 14h nous quittons le ponton, il nous faut arriver vite avant la nuit à la prochaine escale.
Détail qui n’en est pas un : nous nous sommes délestés de nos poubelles que nous avions correctement triées et de notre ancienne ancre grâce à l’organisation du rallye.
Deux options entre lesquelles nous avons beaucoup hésité. Nous rendre sur l’île de Tsushima ou nous diriger vers Hiroshima.
Nous savions pertinemment que ce nom illustre de Tsushima allait réveiller quelques « souvenirs-réflexes » chez certains d’entre vous. « Que fit l’amiral Togo pendant la bataille de Tsushima ? »
Pour notre part, Hiroshima l’a emporté !
Oshima. Munakata Oshima. Nord Kyushu. 21 avril, 16h30. Amarrage facile contre le quai. L’Office de tourisme est encore ouvert et nous propose un bain ! Je pense que la dame voulait nous proposer une douche. Le lendemain balade, temps maussade. Le Torii vermillon sur la plage les pieds dans l’eau devant l’île Saya couverte de pins…
et le sanctuaire d’Okitsumiya, lieu de pèlerinage.
Saviez-vous que certaines azalées exhalent un délicieux parfum ?
Bellamare arrive sous la pluie vers midi puis deux petits voiliers japonais se calent entre nous. La soirée est un peu gâchée par la houle qui rentre et nous chahute tous contre le quai pendant 3 heures.
23 avril. Appareillage aux aurores, sous la pluie, nous avons de la route à faire pour entrer en mer de Seto. La mer est assez agitée, (mer 5). Avec 20 à 28 nœuds de vent presque dans le nez, trinquette et grand-voile à deux ris, nous avançons en ligne directe, pas de bords à tirer, pour être à l’entrée du canal à l’heure. Il faut être en phase avec le courant dans le passage. Le balisage AIS est posé sur d’énormes quadripodes jaunes.
Kanmon Passage. Entre l’île de Honshu et de Kyushu. Il fait gris, la mer est houleuse, le paysage très industriel et les cargos assez proches de nous.
Dans le passage tout se calme bien sûr, le courant est avec nous. Les garde-côtes nous demandent de naviguer au moteur, nous interrogent sur le voilier, nos identités et notre destination. Nous les croisons ensuite sur l’eau et ils nous saluent avec de grands mouvements de bras… Non, nous ne rêvons pas, c’est bien une réplique de la place Saint-Marc à Venise que nous voyons là, sur notre droite.
2 nœuds de courant avec nous qui se transforment en 4 nœuds juste sous le pont.
La mer de Seto est large, plutôt bienveillante, nous suivons la même route que les cargos descendants. Puis, il nous faut traverser pour rejoindre l’escale prévue dans la petite île d’Otsushima.
Otsushima. Honshu. 23 avril. Pas grand monde dans ce port mais une bonne protection. La nuit tombe lorsque nous nous amarrons au quai.
Très beau temps au réveil le lendemain pour découvrir l’ancienne base d’entrainement des Kaiten.
Musée petit, mais émouvant : nous sommes accueillis dans un jardin aménagé sur la colline au-dessus du port par deux charmants vieux messieurs qui parlent anglais ! Nous empruntons une allée jalonnée de dalles carrées gravées des noms de tous ceux qui ont donné leur vie pour leur pays.
Une torpille est là, devant nous, posée sur son ber,
mais ce n’est qu’une fois dans le musée que nous découvrons l’intérieur de la cellule dans laquelle se tenait le pilote.
Le Kaiten (à traduire par « Départ pour le ciel ») était une torpille suicide conçue autour de la torpille Type 93 par la Marine impériale japonaise dans l’étape finale de la Seconde Guerre mondiale. Ces engins étaient dotés de 1 550 kg d’explosif soit trois fois plus qu’une torpille classique. Les Japonais attendaient beaucoup de cette arme nouvelle, mais son utilisation se révéla être un fiasco car 45 seulement purent être lancées et les pertes infligées aux Américains furent faibles et inférieures à celles des attaquants.
1426 hommes avaient été sélectionnés, la plupart étaient des apprentis pilotes de l’aéronavale, choix cohérent étant donné les nécessités de la conduite des Kaiten. Ils avaient de 17 à 28 ans. Plus de 1500 participants au programme (embarqués sur des navires, sur des sous-marins porteurs de Kaiten) perdirent la vie dont 106 pilotes de Kaiten.
Film « l’homme torpille » de Shue Matsubayashi, tourné en 1955.
Hiroshima. Honshu. 25 avril pour 10 jours. Encore une arrivée à la fin du jour, d’abord traverser les parcs (à huitres cette fois), bien visibles, amarrage plus facile, disons plus simple, au ponton : des défenses légères, quatre aussières et c’est terminé. Il n’y a pas grand monde dans cette marina. Le quai « visiteurs » est spacieux et très bien protégé. Toujours un problème de connexion aux bornes électriques, nous avons pourtant un grand choix de prises à bord, mais aucune ne convient depuis que nous sommes au Japon.
Au réveil, nous avons hâte de nous présenter au bureau et surtout hâte de monter dans le Shinkansen pour nous rendre à Kyoto. L’hôtel est réservé depuis la veille, mais nous n’avons pas les billets de train.
A la sortie de la ville, la campagne est agréable, les rizières brillent sous le soleil et les maisons sont belles et cossues.
Kyoto. Honshu. Nous sommes en pleine Golden Week (une des rares périodes de congés des Japonais) ce qui signifie touristes japonais en vacances à rajouter aux touristes étrangers. Le Shinkansen circule toutes les 15 minutes entre Hiroshima et Kyoto, souvent à 300 km/heure. Il faut se mettre dans la queue sur le quai là où notre porte de voiture est prévue s’ouvrir. Attention à ne pas rater son train car il y a déjà des candidats pour le train suivant dans la file d’attente. Ensuite un bus et trouver l’hôtel. Les grandes artères de cette ville ne sont pas esthétiques mais derrière les façades d’immeubles se cachent des ruelles avec de petites maisons typiques, les Mashiyas. Construites de façon ingénieuse pour résister aux tremblements de terre, pour contrôler l’humidité, la chaleur ou le froid. Elles sont souvent étroites en pignon sur la rue, car les taxes étaient calculées en fonction de la largeur du bâtiment. Bien sûr, les portes en treillis de bois et papier blanc coulissent en douceur et la lumière est savamment calculée à l’intérieur.
Notre plaisir est de changer de rue chaque matin pour prendre un bus et de changer de lieu pour les repas de la journée.
Je vous laisse découvrir nos photos des lieux incontournables que nous avons visités.
Le Temple de To-Ji et sa fameuse pagode disposés dans un jardin planté de cerisiers en fleurs, d’azalées et d’iris. Dans les temples les bouddhas veillent sur la cité depuis 796. Les statues de bois qui entourent le trône du bouddha cosmique sont vieilles de 1200 ans. La Pagode des temples de To-Ji, emblème de Kyoto est la plus haute structure en bois du Japon, cinq niveaux, une splendeur d’élégance ! Nous y reviendrons un soir pour l’admirer une nouvelle fois sous ses éclairages.
Le Palais Impérial. XVIème siècle. Un immense parc et deux palais, bâtisses à un niveau dont on fait le tour sur une passerelle en bois en admirant les pièces ouvertes à la vue du public.
Le château de Nijō. XVIIème siècle. C’est un château de ville sur un seul niveau dans un grand jardin. Plusieurs bâtisses, reliées entre elles par des passerelles, toutes en bois, aux planchers recouverts de tatamis, aux cloisons coulissantes décorées de tigres, de forêts et de beaucoup de nuages dorés qui allègent les compositions. Et ces fameux « planchers Rossignol » qui grincent. Était-ce prémédité pour prévenir de la présence d’un intrus ou est-ce dû à la construction en bois de toutes les structures ? La légende est belle et nous la garderons. (Lire Le clan des Otori). Pour toutes ces constructions dont je vous parle depuis notre arrivée au Japon, aucun assemblage ne contient de vis ou de clous en métal, ce sont des chevilles en bois qui fixent toutes les structures.
Fushimi Inari Taisha, les fameux Torii rouges. Le sanctuaire daterait d’avant 796. La gigantesque porte Romon donne accès à l’allée bordée de milliers de Torii vermillon, une inscription verticale en noir sur chaque, le nom du donateur. Difficile de trouver l’angle pour une photo sans touristes.
Le Pavillon d’Or ou temple du Kinkaku-ji. L’original date du XIVème siècle mais a été reconstruit après un incendie. Ce n’est pas une grande construction mais elle est légère, élégante, recouverte de feuilles d’or. Elle se reflète dans un petit lac bordé d’iris et d’arbustes colorés allant du jaune au rouge de l’érable en passant par tous les verts.
Le Pavillon d’Argent ou temple Ginkaku-Ji, C’est en hommage à son grand père qui avait construit le Pavillon d’Or que le concepteur de ce pavillon a fait construire cette résidence, mais il n’a jamais été recouvert d’argent, le pays étant en guerre.
Le temple Kiyomizu-dera sur une colline à l’est de la ville. Et comme nous sommes en weekend beaucoup de Japonaises et quelques Japonais arborent leurs kimonos. Pour les occidentaux qui veulent faire l’expérience de vivre comme des Japonais, il est aussi possible de louer toute la tenue jusqu’aux chaussures et sac à main assortis.
Le quartier de Gion, quartier des Geishas. Nous avons eu la chance d’arriver à la fin d’un spectacle et avons pu admirer et photographier ces dames. Mais nous n’avons jamais croisé une Geisha au visage tout blanc et aux lèvres en forme de cœur. Le quartier, une fois sortis de la rue principale, est charmant, de vieilles maisons aux façades en bois avec toujours ces fameuses brise-vues à lattes verticales.
Le marché Nishiki, un peu déçus, c’est plutôt une galerie marchande. Il faut y aller vers 18h pour admirer les étals de fruits et légumes et nous nous y étions deux fois de suite trop tard.
Nara. Une journée sous la pluie. En train et bus. Eclosion de parapluies transparents pour se protéger. Les daims s’en moquent et viennent quémander un peu de biscuits. Ici à Nara tout ce qui se visite est regroupé dans un immense parc.
Le temple Todai Ji et son Grand Bouddha.
A très bientôt pour la suite.