Nous avons laissé Manevaï pendant un mois pour rentrer en France et sommes de retour à Cordova bientôt rejoints par Quentin qui arrive tout droit de Panama City.
Quentin découvre “the alaskan way of life”. D’abord par l’intermédiaire de son chauffeur Hoots, Un phénomène connu par tous ici et certainement ailleurs, il est un spécialiste des avalanches. Puis la marina, les loutres, le phoque, les bateaux de pêche tous désarmés à cette saison…Le port est très calme depuis notre arrivée, la saison de pêche est terminée, les bateaux sont dépourvus de leurs apparaux et bien sages à quai, les saumons ont tous été traités, mis en boites, sous vide, congelés…



Au risque de se faire tremper, nous déambulons dans la rue principale, nous sommes dimanche, dommage tout est fermé.
Du 21 au 29 septembre.
Appareillage lundi matin pour un plein de gazole. Comme prévu ce jour-là, il fait un temps magnifique. Eric a choisi un mouillage tout proche.
La première baie à gauche en sortant. Deep Bay. Derrière une petite île. Nous profitons au maximum de cette journée : la lumière, le paysage, les reflets, les nuages qui s’effilochent sur les pans de montagnes, les loutres, les aigles… Les deux hommes partent en annexe. C’est sans doute la seule journée de beau temps qui nous est offerte avant longtemps. Une séquence pêche pour notre fiston, rien au bout de la ligne.
Il interroge Chat GPT pour améliorer sa technique de pêche. « Dis-moi Chat GPT, cherche-moi comment pêcher le saumon en Alaska, et donne-moi la vitesse du bateau. Prends ton temps pour me répondre ».
Lundi, une journée en mer intérieure pour Land Locked Bay. Quatre baleines aperçues. Le vent arrière passe de 9 à 30 nœuds en rafales puis se calme. Neuf heures de transit avec encore un problème de pilote automatique, nous entrons dans Land Locked sous un timide soleil de fin d’après-midi. Autour de nous, marée basse et reflets de grève rouillée, de pins vert-sombre, de brume qui rejoint le ciel.
La pluie s’invite dans la nuit, timide. Pas de coups de vent pour ébranler Manevaï. Pas de wopliwopla ! Surnom donné par Quentin aux Williwaws (Nom d’origine amérindienne : violentes rafales soufflant dans le détroit de Magellan).
Au réveil tardif, calme et beauté. Dehors au sud du PWS « ça piaule » ! Nous ne ressentons rien. L’atelier est ouvert, il faut réparer la porte vitrée de la descente. Deux techniciens se penchent sur le travail.
A l’heure de l’apéritif, tout est réglé ! Manevai est étanche ! Ça peut servir si la météo est difficile lorsque nous nous échapperons du PWS. Pour l’instant la fenêtre qui nous permettrait de traverser se fait attendre. Dépression dans le Golfe donc très fort vent d’Est en Ouest. 48 heures mouillés pour attendre une accalmie. La pêche est bonne, deux Stealhead trouts !
Allez, on veut voir ailleurs et direction Eagle Bay (Growler Bay) sur Glacier Island. Nous ne tentons pas d’aller jusqu’au glacier, l’horizon est un peu bouché. Dommage, nous voulions montrer un glacier à notre fils. Matinée passable mais la pluie fait son retour. L’arrivée au mouillage est superbe. Nous dérangeons les loutres qui paressent sur le dos.
Quentin pêche, beaucoup de touches, l’appât est entamé, mais les gourmands sont prudents. Et sort un poisson minuscule. Une nuit au calme.
En route vers le sud. Belle journée, de quoi me réconcilier avec l’Alaska. Pas de vent, moteur, direction Inchinbrook pour être parés près de la sortie. Deux barges dans le rail plus un navire à passagers qui monte au Glacier.
Ce rail a été instauré après la catastrophe de l’Exxon Valdez en 1989, lorsque le pétrolier l’Exxon descendant de Valdez s’est déchiré sur le Bligh Reef. (Au centre de la carte).

Nous allons nous mettre à l’abri, prêts à bondir dimanche soir ou lundi matin en route vers le Cap Spencer. La fenêtre météo se confirme. À voir quel sera l’état de la mer et si les prévisions se révèlent justes.
En attendant ce soir et demain, ce sera atelier boulange dans le carré. Pains et gâteaux.
Samedi. Un peu de pluie ici et beaucoup de vent à l’extérieur ! Nous sommes à Constantine Harbor, sur l’île d’Inchinbrook. Incroyable ! Un lac fermé. Le passage est un peu étroit, sur les cartes, il est indiqué 0,9 m de profondeur, mais il y a au minimum 2 mètres d’eau sous la coque à marée basse. Nous sommes mouillés par 4 mètres de fond, entourés de verdure, de montagnes, de reflets et de loutres. La lumière chaude du coucher de soleil nous captive et nous retardons le moment du dîner.

Le village de Nuchek se trouve lui de l’autre côté à l’ouvert de la grande baie d’Etches Harbor.
L’ancien village de « Nuuciq » se situe sur une île de 3km2 du PWS. A la fin des années 1790, les Russes y avaient bâti un fort et un comptoir de commerce nommé fort Constantine et Fort Hélène. De nombreuses nations avaient ensuite revendiqué cette zone : Espagne, Angleterre et États-Unis. Aujourd’hui, Nuchek appartient de nouveau à ses propriétaires d’origine, le peuple Chugach. Depuis plus de 30 ans, le village renait 15 jours par an en juillet. Jeunes et Anciens se réunissent pour célébrer leur Histoire et renouer avec leurs traditions.
Samedi matin. « Quoi ? Mais on avait réservé la baie pour nous tous seuls ! » Un senneur est entré et a mouillé au fond de la baie à l’ouest.
Des biches, trop tard pour la photo, peut-être demain à la même heure ?
Trois nuits dans ce havre de paix. Beaucoup de pluie malheureusement, une sortie en annexe pour les valeureux pêcheurs (rentrés bredouilles), des parties de Rummikub et de dominos en soirée.
Le Prince William Sound fut d’abord baptisé par Cook en 1778 « The Sandwich Sound » pour honorer son mécène le comte de Sandwich. Plus tard, il fut renommé William Sound par Vancouver en l’honneur du troisième fils du roi George III.
Sa superficie est 10 000 km2, équivalent à la superficie du département de Gironde.
C’est le berceau de la pêche aux saumons. The Alaska Department of Fish and Game’s a dévoilé les chiffres de la pêche pour cette saison : 48,7 millions de saumons dans le PWS à ce jour pour un total de 186 millions pour le territoire. Voici une idée des prix d’achat pratiqués par les conserveries envers les pêcheurs professionnels. En mai, le prix du saumon rouge était de 8 dollars la livre, en juin le prix est descendu à 2,25 dollars la livre. Le prix du King est resté à 20 dollars la livre tout l’été.
Cordova : L’histoire de Cordova débute par l’arrivée de l’Espagnol le lieutenant Don Salvador Fidalgo à bord du San Carlos en 1790. Il nomme cette baie Puerto de Cordoba en l’honneur de son mécène Don Luis Cordoba y Cordoba. Il constate que les Natives utilisent déjà le cuivre pour leurs objets usuels mais ce n’est qu’à l’aube du 20ᵉ siècle qu’un gisement de cuivre particulièrement riche est découvert à Kennecott à 320km de la petite ville dans les Wrangell Mountains. Une voie de chemin de fer est construite, pour acheminer le minerai, une véritable prouesse technique, moins 50° C, des bourrasques qui font dérailler les wagons et des blizzards qui ensevelissent les locomotives. Beaucoup de personnes ne croyaient pas en cette ligne ferroviaire et la « Copper River and Northwestern Railway” était surnommée “Cannot Run and Never Will Railway.”
A l’apogée de l’exploitation, 600 personnes vivent dans le campement de Kenicott. A sa fermeture en 1938, la mine aura produit 200 000 tonnes de minerai, cuivre, argent et or, pour une valeur de 200 millions de dollars. Depuis, les mineurs ont été remplacés par des touristes randonneurs arrivant en avions-taxis, logés dans des lodges, hôtels et B&B. Après la fermeture de la mine, la ville s’est tournée vers la pêche, véritable rente économique, en particulier pour le saumon rouge et le King de la Copper River. Actuellement 2413 habitants vivent à Cordova tous dépendants de la pêche en saison (mi-mai à fin septembre).
Cordova était aussi la zone la plus importante de récolte de couteaux (1916/1950) mais celui de l’Atlantique entra en compétition et lui fit beaucoup de tort. Le filon fut aussi presque anéanti par le tremblement de terre de 1964, le sol remonta de plus de1,90 m. A présent, la pêche aux couteaux n’est plus qu’une activité familiale récréative.






C’est aujourd’hui une destination pour les pêcheurs, les ornithologues et les amoureux de la nature. La chasse succède à la pêche après l’été. Traquer des cerfs noirs de Sitka, des mouflons, des ours bruns et noirs. Les activités de chasse nécessitent un vol en avion-porteur (hydravion) pour accéder aux zones de chasse et se déroulent souvent sous forme de randonnée en montagne, elles nécessitent aussi des autorisations.
En hiver, les journées sont plus courtes, les locaux pratiquent le patin à glace, le ski sur les pentes du Mont Eyak et se retrouvent pour quelques évènements. Télésiège historique de 1939. Ce télésiège est arrivé à Cordova en 1969 après avoir été décommissionné de la Sun Valley en Idaho. Mt. Eyak propose environ 30 options de pistes et un remonte-pente pour les débutants.

Enfin le départ ! 29 septembre, en route pour Sitka. Nous disons adieu à notre terrain de jeux, et aux otaries mollement installées sur un gros rocher assez élevé. Leur parfum matinal est discret, ce n’était pas le cas à notre arrivée.
A la sortie de la baie, un gros remorqueur entre en contact avec nous. Un pétrolier descend de Valdez et doit sortir du PWS. Pour sa navigation dans la zone, il est déjà accompagné de deux remorqueurs et ce troisième l’attend au cas où. La catastrophe de l’Exxon Valdez a suffi et toutes les précautions sont prises à présent pour venir en aide à ces gros bateaux en cas de difficulté. Des moyens anti-pollution (remorqueurs, barges, filets submergés) sont pré-positionnés en divers endroits dans la baie.
Et c’est parti pour trois jours de traversée…
merci à Apple et David pour leur collaboration.
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