10 juillet nous quittons Dutch Harbor, après un plein de gazole, 150 gallons. Eric met du temps à revenir à bord, explication :  les gars de la pompe aiment bavarder et échanger.

Marsouins de Dall.

Eagle Harbor. Shumagin Islands. 12 juillet, 48 heures de mer pour y arriver, il fait bien gris et enfin nos premières baleines, un régal !

Elles sont nombreuses, je les voudrais plus proches, mais pas trop quand même. Des nuées d’oiseaux les accompagnent et pour cause : elles mangent « salement » et ils profitent des perturbations créées par les grosses bêtes dans l’eau, perturbations qui font remonter des petits poissons et des organismes qu’ils happent pour se nourrir.

En soirée, nous mouillons dans un plan d’eau, derrière la jetée naturelle d’un mètre de haut, composée de sable, de cailloux et de verdure à son sommet. 21 mètres de fond quand même, une famille de loutres prend peur à notre passage pourtant discret.

Un phoque garde ses distances en nageant près du rivage.

La digue. Pas une ride à la surface de notre piscine naturelle.

Un Martin-pêcheur transi.

Tout est calme, quelques oiseaux comme les huitriers pies, les tout petits phalaropes à bec étroit, des aigles, des méduses à crinière de lion aussi. Nous n’y restons que 24 heures, les prévisions météo annoncent du vent pour la nuit suivante, nous voulons en profiter et quittons notre abri vers 16h.

13-14 juillet. En mer.  Navigation de nuit, entre l’île de Kodiak et Main Land… nous cherchons le vent. Toute la garde-robe de Manevaï y passe, Génois, Code zéro, Spi et… moteur.

On ne s’en lasse pas…

Agripina Bay, 15 juillet 5 heures du matin.

L’entrée est superbe, la mer est presque plate et nous cheminons entre les rochers. Aujourd’hui c’est assez paisible, mais qu’en est-il lorsque la mer est en furie ?

Il pleut toute la journée, nous ne sortons pas du carré et n’avons donc pas vu d’ours. Et pourtant, ce mouillage s’y prête. A marée basse, la grève est découverte et il doit y avoir beaucoup de coquillages. Mais en ce moment, ils préfèrent les baies rouges, les Salmon berries. Un seineur est venu s’abriter du coup de vent prévu pour cette nuit.

16 juillet. 8h30, direction l’île de Kodiak en face.  Il fait gris et il pleuviote.

Halibut Bay. 16 juillet. Nous retraversons le chenal en espérant qu’en face la houle ne se fera pas trop ressentir, car pour l’instant en mer, elle arrive croisée du nord et du sud.

Il fait un temps bien maussade, nous voyons à peine la côte. Près de la pointe, nous distinguons un pêcheur mouillé dans la baie, bon, ce doit être un bon mouillage, il ne bouge pas, donc il n’y a pas de houle. Alors que nous affalons la grand-voile, je vois une couture ouverte. 50 cm à reprendre.
Le dîner est prêt et peut attendre, nous n’avons plus qu’à sortir les aiguilles et le fil suifé. Il fait jour très tard et il ne fait pas trop froid.

90 minutes pour recoudre les points qui ont lâché, merci Rolly Tasker ! Nous avions demandé que toutes les coutures de la grand-voile soient révisées et reprises, rien n’a été fait. A minuit, nous sommes enfin couchés. Une nuit très calme et nous reprenons notre navigation non sans avoir essayé de pêcher du halibut (du flétan).


Peu de vent, c’est à nouveau au moteur que nous traversons dans l’autre sens le Détroit de Chelikof, pour Geographic Harbor.

Alerte tsunami par VHF.12H37. Un tremblement de terre a eu lieu près de Sand-Point (7,3) et nous recevons par VHF des alertes répétées toutes les 10mn, « ne pas rester près des côtes, ne pas être mouillé par petit fond en cas de tsunami ». Nous ne voyons, ni ne sentons rien. Manaia est à Sand Point en marina et sans moteur ne peut pas bouger et Rewild est mouillé non loin de là. Tous les deux ont bien ressenti les secousses. A Kodiak les navires de toutes tailles ont quitté les pontons en urgence et sont rentrés quelques heures plus tard.

Geographic Harbor. 17 juillet après 9 heures de moteur nous sommes dans le Saint des Saints, l’entrée est magique, malgré le petit crachin.

Sur les pentes des volcans on peut apercevoir des plaques de neige alternant avec des taches blanc-jaune, vestiges des cendres portées par le vent après l’éruption du volcan Novarupta en 1912.


18 juillet, une sortie en annexe pour apercevoir nos premiers ours, malheureusement trop loin. Mais, mais de retour à bord nous l’avons enfin notre ours ! Un gros nounours qui vient prendre son bain à coté de nous et qui ensuite va cueillir son dessert. Eric descend dans l’annexe et part à sa rencontre “photographique”….

Deux nuits plus tard, nous quittons ce paradis pour nous diriger vers Kodiak.

D’abord calculer pour avoir les courants dans le dos. Donc, ce sera un arrêt à Port Bailey, où nous espérons retrouver Anita et Robert, rencontrés en 2017.  Mais le lendemain matin il n’y a personne, cela semble toujours habité et nous n’osons pas mettre pied à terre. Nos appels par VHF restent sans réponse.

Notre mouillage.

L’ancienne conserverie.


Donc en route vers Kodiak. Dimanche. Dans le fameux passage, notre vitesse frôle les 10 nœuds. Comme la veille, nous croisons beaucoup de pêcheurs, des senneurs. La pêche au saumon bat son plein.

Arrivés à St Paul Marina. Wodan est là pour prendre les aussières.

Cette marina est extraordinaire, nous sommes au milieu des bateaux de pêche et il y a de la vie. Malheureusement les poissons n’arrivent pas jusqu’à nous, ils sont débarqués aux usines de conditionnement et nous assistons au ravaudage des filets et nettoyage à grande eau des filets de pêche et des ponts.

 

Ici il y a des poubelles.

Les équipages sont sympas, s’intéressent à nous, nous échangeons mais ils sont busy, toujours en partance chargeant provisions, boissons, matériel. Nous promenant sur les bords de la marina, intéressés par le nettoyage des poissons, un particulier nous offre deux filets, nous sommes ravis et l’invitons à passer à bord avec son fils mais nous ne les retrouverons pas. Thank you so much.

Nous retrouvons Somerset pour un apéritif à bord de leur catamaran. Nous nous connaissons depuis le rallye en Indonésie.

Anniversaire du skipper.

Notre premier appel par WhatsApp est pour Martine et Joël. Nos amis vont bien, viennent d’emménager dans une maison et terminent leurs rangements. La maison est située en bord de passage en face de Herman Island, ils nous ont d’ailleurs vus passer dimanche et ont reconnu Manevaï. Nous les avions rencontrés en 2017, installés depuis 20 ans à Kodiak, ils avaient monté une entreprise de traiteurs Galley Gourmet. (La taille des éclairs était prévue pour contenter les yeux et les palais des Américains).

Mercredi, Martine nous rejoint pour nous faire profiter de sa carte Safeway et notre ticket de caisse se voit agréablement allégé. Le rayon fruits et légumes est bien vide. Les pêcheurs sont passés et ont fait une razzia de citrons, choux blancs, il faudrait attendre le ravitaillement qui arrive par cargo le lendemain. Mais Martine  connait bien sa ville et nous emmène au Cost Saver. Nous faisons le plein de citrons et nous nous laissons tenter par des pêches au parfum irrésistible.

Le soir diner chez eux préparé par Joël, un régal un poulet à la normande (au cidre, car à Kodiak on fait du cidre), j’avais apporté le dessert : un gâteau à la crème de marrons. Je crois que cette boite de crème de marrons (non périmée) avait été achetée en Nouvelle-Calédonie. Je la réservais pour une grande occasion. J’ai pu aussi en offrir aux équipages autour de nous.

Jeudi soir, nous les recevons à bord et là, je rate mon “salame de chocolate » ! Je vous rappelle que Joël a été sacré meilleur apprenti pâtissier de France.

Le lendemain, je convertis mon « salame » en gâteau en rajoutant de la farine et de la levure et j’en offre autour de moi.

Saint Herman Mission.

 Je voudrais visiter la cathédrale mais elle est toujours fermée.

Le musée historique, anciennement Baranov.

Les 4 saints d’Alaska. Saint Herman, Saint Innocent, Saint Peter the Aleout, Saint Juvenal.

Ici on aime les armes.

Ici certains votent T.

Samedi 26 juillet. Après un dernier adieu à Martine et Joël et après avoir réglé nos dettes au bureau (mais pourquoi avons-nous payé une nuit supplémentaire ?) nous quittons le ponton, pressés d’arriver avant 12 h à la station fuel. Remplissage de la cuve et direction … Non pas de direction du tout, notre commande-moteur est bloquée ! On ne peut passer ni la marche arrière, ni la marche avant. Démontage, analyse, graissage et ouf ça marche !!!

Kodiak.

N’oublions pas que l’Alaska était russe ! Territoire découvert par Vitus Béring en 1741.

Ce territoire était habité depuis des milliers d’années par des Amérindiens de différentes ethnies. Le gisement de loutres de mer a attiré les convoitises des grandes nations en tout premier lieu la Russie leur grande voisine, l’Angleterre, l’Espagne et la France.

Les loutres de mer possèdent un pelage nullement égalé, 170 000 poils au cm2 qui apportent chaleur et étanchéité.

Donc les navires russes débarquent en 1792 sur l’île de Kodiak et fondent une ville qui sera la capitale de l’Amérique russe pendant 7 années. Ces colons blancs réduisent les Indigènes en esclavage et les obligent à chasser toujours plus loin. Le commerce est fructueux, les Natifs y perdent leurs racines et la vie. Leur nombre diminue. De force ils sont convertis à la religion orthodoxe et doivent apprendre la langue des envahisseurs. Les missionnaires défendent les droits des Alutiiq et leur permettent de conserver leur langue.

Les Alutiiq pêchaient et séchaient le saumon pour leur consommation personnelle. Ils furent forcés de pêcher et de traiter le poisson pour nourrir les expéditions de chasse aux loutres, les villages aux environs, et les bases russes ailleurs en Alaska. Ils salaient le saumon et le conditionnaient dans des tonneaux de bois. 

Cette occupation va durer de 1741 à 1867, date de la vente de l’Alaska aux États-Unis. Les locaux doivent apprendre une nouvelle langue.

La chasse à la fourrure continue, ours, loutres de terre, castors, hermines et renards sont vendus dans le seul magasin de Kodiak. Beaucoup de chasseurs sont originaires de Sibérie et quelques-uns de Finlande, car la Finlande appartient à ce moment-là à la Russie.

La compagnie russo-américaine créée par Baranov et Rezanov contrôlait toutes les marchandises, les achetait aux Alutiiq et les leur revendait plus cher…

Puis auront lieu les arrivées des Chinois, Japonais, Philippins comme main d’œuvre pour les conserveries de poissons. En 1888, 5 conserveries étaient implantées à Karluk, non loin de Kodiak town, mais le lieu n’était pas facile d’accès et les populations alutiiq étaient chassées de leurs lieux de pêche. De plus l’augmentation de l’exploitation des rivières contribuait à la diminution du nombre de poissons.

En 1893, conscients du danger les priopriétaires des conserveries fondèrent la Compagnie “Alaska Packers Association”. Elle produisait 70% des boites de conserve de saumon.

A cette époque seul le saumon sockeye était mis en boîte. Pendant la première guerre les boîtes de pink salmon devinrent un élément essentiel des rations militaires. Après la guerre les soldats et les Européens continuèrent à en consommer ce qui entraina une hausse du marché du pink salmon.

1912, Après l’explosion du volcan Novarupta à 160km, Kodiak est recouvert sous 30cm de cendres. La ville est plongée dans l’obscurité pendant 3 jours. Les habitants de la ville sont en manque de nourriture et d’eau potable. Les animaux sont intoxiqués et meurent. Les conserveries ne fonctionnent plus. 

Mème des années après l’éruption , des vents forts peuvent encore soulever les cendres du sol et les transporter sur Kodiak, provoquant des perturbations.

Durant la seconde guerre mondiale, Kodiak servit de base de ravitaillement aux troupes nord-américaines engagées dans les Aléoutiennes. Militaires et ouvriers ont transformé le petit port de pêche de 500 habitants en une ruche frémissante de 4000 personnes. 20 000 autres étaient stationnées dans les environs. La marine américaine a alors construit une base importante sur un site actuellement utilisé par les US Coast-Guards.

1964, Good Friday, terrible tremblement de terre de magnitude 9,2 suivi d’un tsunami puis d’incendies. La ville est détruite, 13 morts sont à déplorer, le port a été gravement touché , les bateaux de pêche sont sur les toits des maisons, il ne reste rien. Électricité, conduites d’eau, plus rien ne fonctionne.

L’économie de Kodiak a toujours reposé sur la pêche :  le saumon vous dis-je, le saumon ! Le crabe des neiges et le crabe royal. Second port de pêche de l’Alaska et le 4ème, économiquement parlant, des États-Unis. A cela s’ajoute une station et un poste de commandement de l’United States Coast-Guards.

Bien sûr l’été amène son lot de touristes pour la pêche, la chasse (daim noir, cerf, chèvres sauvages), l’observation des glaciers, des ours, des baleines et des oiseaux.

La région regorge aussi de baies rouges, friandises appréciées des habitants et des ours.

Très peu de routes sur l’île, les déplacements se font principalement en bateaux ou hydravions.

www.manevai.fr

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